Net Vs Réputation: un combat inégal.

 

Internet fonctionne de telle sorte que la moindre rumeur peut aujourd’hui devenir mondiale en quelques heures ou en quelques jours. Elle se répand à une vitesse extraordinaire et exponentielle  entre sites éditoriaux, blogs et forums. Il n’en faut pas moins pour détruire une réputation à tout jamais en quelques instants sur la base de fausses informations.

La situation  est d’autant plus avérée que les nécessités commerciales de l’information sont aujourd’hui telles que les médias ont besoin de renouveler sans cesse leurs sujets et qu’ils ne prennent plus le temps de les vérifier en profondeur,  confondant actualité et buzz. Et ce travers  est également d’autant plus fort que le public est particulièrement friand de ce qui peut nuire à la réputation des personnalités.

Face à cela, la loi est fort désarmée.

En  France, pays pourtant bien équipé législativement sur ce point, la loi de 1881 présentait déjà l’inconvénient du temps de retard,  inévitable en ce que lié aux contraintes de la procédure,  quand il s’agissait seulement de combattre les diffamations ou autres délits de presse commis par les médias traditionnels, qu’il s’agisse de la  presse écrite ou des médias audiovisuels. Pour autant, la tâche était nettement facilitée dans la mesure où le support en cause était isolé et où la poursuite produisait  ses effets sans grand risque de récidive.

Avec Internet, la situation est tout à fait différente.

Certes, la loi, et ici encore particulièrement la loi française à travers les dispositions du texte de 2004 sur la confiance dans  l’économie numérique ou des textes régissant la gestion des données informatiques individuelles, permet d’obtenir la suppression d’internet et la désindexation sur les moteurs de recherche d’articles et d’informations qui sont contraires aux droits des personnes. Mais il faut bien être conscient que ceci implique une demande, le temps de réaction à celle-ci,  puis  une procédure avec toute son inertie et ses délais en cas de mauvaise volonté des acteurs en cause.  Et il faut aussi et surtout mesurer qu’une fois qu’on a obtenu le nettoyage d’une information sur un site, on est susceptible de la retrouver dans les heures qui suivent sur un autre site, et ainsi de suite, jour après jour.

La personne qui est confrontée à ce genre de difficulté est ainsi aujourd’hui dans une situation extrêmement délicate et lutte à armes inégales contre ce monstre médiatique qu’est devenu Internet.

Elle doit dès lors pour se défendre aller consulter des cabinets d’avocats spécialisés qui doivent mettre en place des process quasiment automatisés pour attaquer sans relâche tous les sites qui peuvent véhiculer et publier l’information litigieuse. Et ayant réussi à le faire,  ce qui n’est pas simple, il n’est alors jamais acquis que l’information ne refleurisse pas ailleurs pour se répandre à nouveau comme une trainée de poudre. De droit à l’oubli, il n’est même plus question. A cela s’ajoute une note de complexité particulièrement lourde : les informations proviennent parfois de pays dans lesquels la loi est beaucoup moins protectrice que celle de la France.

Au bout du compte, tout ceci coûte très cher à la personne qui a la malchance de se trouver dans cette position, avec on le comprend dans de telles circonstances, des chances de succès plutôt aléatoires.

Autant dire qu’Internet peut être une arme de destruction massive de la réputation de tout un chacun. Et de ce point de vue, aucun d’entre nous n’est à l’abri.

Pour cette raison, beaucoup d’acteurs de cette problématique se tournent désormais  vers d’autres solutions et méthodes que celles d’ordre purement juridiques et judiciaires.

Internet étant un automate, l’idée est devenue de s’appuyer sur  sa logique fonctionnelle pour en contourner des effets toxiques de la nature de ceux qu’on a décrits.

Fleurissent donc aujourd’hui des entreprises d’un type nouveau dont le but est de créer et de mettre en œuvre des méthodes et des solutions purement techniques  pour marginaliser les informations litigieuses,  et émuler les moteurs de recherche qui en font état,  de sorte qu’elles deviennent difficilement visibles pour les internautes. Cette gymnastique est un pis-aller coûteux et complexe mais reste une solution opérationnelle à terme.

Dans le même ordre d’idée, nos cabinets d’avocat suggèrent souvent à leurs clients des mesures complémentaires et synergiques passant par des contre-attaques médiatiques consistant à se raccrocher à des informations critiques en créant des sites les reprenant pour mieux les combattre. Le combat n’est plus juridique ni judiciaire. C’est une guerre de la communication et une course aux premières places sur les moteurs de recherche.

Enfin, nos cabinets conseillent parfois à certains organismes ou certaines entreprises qui sont attaqués comme tels de protéger leur dénomination à titre de marque de façon à pouvoir s’attaquer sous l’angle de la contrefaçon, du dénigrement ou du parasitage, à tous ceux qui les utiliseraient à des fins détournées et dommageables.

On le voit, ce combat impose aujourd’hui une stratégie inventive, qui va bien au-delà de l’application d’une loi sur la presse qui est certes pleine de bonne volonté mais dont la mise en œuvre est délicate et souvent si lente qu’elle est d’entrée dépassée.

Morale de l’affaire pour ceux qui ne veulent surtout pas se gâcher la vie avec tout ça: « vivons heureux , vivons cachés ». Et pour ceux qui ne le pourraient pas, ayez le cuir épais et souffrez  votre sort en vous contentant d’être en ordre avec votre conscience.